Ce 15 juillet 2025 marque le 72e anniversaire de naissance de l’ancien président Jean-Bertrand Aristide. Prêtre, intellectuel, militant des droits des pauvres, puis chef d’État à deux reprises, Aristide reste l’un des personnages les plus influents – mais aussi les plus controversés – de la scène politique haïtienne. Retour sur le parcours singulier de cet homme qui a profondément marqué l’histoire contemporaine d’Haïti.
Une jeunesse modeste et une formation ecclésiastique rigoureuse
Né à Port-Salut, dans le département du Sud, Jean-Bertrand Aristide grandit dans un milieu modeste, élevé par sa mère après la mort prématurée de son père. Très tôt, il entre au Petit Séminaire Collège Saint-Martial, puis poursuit ses études supérieures en philosophie et en théologie, notamment en Italie et en Israël. Ordonné prêtre salésien en 1982, il embrasse rapidement la théologie de la libération, courant religieux qui prône la justice sociale et la défense des plus pauvres.
Son engagement au sein de l’Église catholique, notamment comme prédicateur à l’église Saint-Jean Bosco dans un quartier populaire de Port-au-Prince, lui vaut une large popularité parmi les classes défavorisées et une forte hostilité de la part des élites traditionnelles.
L’entrée fracassante dans l’arène politique
En 1990, à la faveur de la chute de la dictature des Duvalier, Aristide se lance en politique et devient candidat à l’élection présidentielle sous la bannière du Front National pour le Changement et la Démocratie (FNCD). Son message radical en faveur des pauvres, de la justice sociale et contre la corruption séduit massivement : il est élu avec plus de 67 % des suffrages. C’est une victoire historique – la première élection libre et démocratique d’Haïti.
Mais son mandat sera de courte durée. En septembre 1991, un coup d’État militaire l’évince du pouvoir. Il s’exile pendant trois ans avant d’être rétabli à la tête du pays en 1994 grâce à une intervention militaire américaine approuvée par les Nations unies.
Un second mandat sous tension
Après un passage à vide, Aristide revient sur la scène politique et est réélu président en 2000. Cependant, son second mandat est beaucoup plus contesté. Accusé de dérive autoritaire, de corruption et d’avoir favorisé l’émergence de groupes violents connus sous le nom de chimè, sa gouvernance divise profondément la société haïtienne.
En 2004, il est à nouveau contraint à l’exil à la suite d’un soulèvement populaire et d’un contexte sécuritaire chaotique. Il s’installe en Afrique du Sud, d’où il ne reviendra qu’en 2011, accueilli par une population toujours partagée entre fidélité et rejet.
Un héritage toujours débattu
Aujourd’hui encore, le nom de Jean-Bertrand Aristide suscite des réactions opposées. Pour certains, il est le “prêtre des pauvres”, celui qui a porté la voix des opprimés jusqu’au Palais national. Pour d’autres, il demeure un leader populiste dont le passage au pouvoir a nourri la violence et affaibli les institutions.
Peu actif publiquement depuis son retour au pays, Aristide reste néanmoins une figure symbolique majeure, notamment au sein du mouvement Lavalas, dont il est le fondateur.
À 72 ans, Jean-Bertrand Aristide incarne une page complexe de l’histoire haïtienne. Héros pour les uns, responsable du chaos pour les autres, son parcours reflète les tensions, les espoirs et les luttes d’une nation en quête de stabilité et de justice sociale. Son influence continue d’imprégner la mémoire collective, à travers les succès et les échecs d’un homme dont la trajectoire est indissociable de celle du peuple haïtien.
Jean Dalens SEVERE

























































































































