Port-au-Prince, 28 août 2025 — Le chanteur Garry Didier Perez, 59 ans, est décédé jeudi après un long combat contre la maladie. Figure incontournable des années 1990, il avait su imposer sa voix singulière et son charisme sur la scène musicale haïtienne, laissant une empreinte indélébile dans la mémoire collective.
Une carrière jalonnée de succès
Originaire de Port-au-Prince, Garry Didier avait débuté dans des formations locales avant d’intégrer le groupe Zenglen, où il devint rapidement une figure centrale. Son passage dans cette institution du compas moderne reste associé à des morceaux phares comme Fidèl ou Tanbou nou. Plus tard, en fondant Ozone, il confirma son statut d’artiste accompli, compositeur et interprète. Des titres tels que Anba Latè, Sabine ou encore Ou te met ale ont traversé le temps et demeurent aujourd’hui des classiques.
Son timbre, puissant et sensible à la fois, sa gestuelle charismatique et sa capacité à émouvoir ont fait de lui une voix rare dans le paysage musical haïtien. Il appartenait à cette génération d’artistes qui savaient concilier modernité et authenticité, et dont chaque note chantée semblait porter une part d’Haïti elle-même.
Un combat contre la maladie
Derrière les projecteurs, Garry Didier livrait une bataille silencieuse. Dès 2021, il fut confronté à une insuffisance rénale sévère, aggravée par des complications cardiaques. Hospitalisations successives, interventions médicales lourdes, périodes de rétablissement : ces épreuves l’avaient peu à peu éloigné de la scène. En octobre 2023, il subit une opération cardiaque. En janvier 2025, une nouvelle alerte l’amena à passer plus d’une semaine à l’hôpital.
Face à des frais médicaux insoutenables, l’artiste avait lancé une campagne de financement participatif pour réunir 40 000 dollars. Dans un message empreint de dignité et de douleur, il confiait : « Cela fait longtemps que je suis malade. J’ai fourni beaucoup d’efforts pour me rétablir, avec la grâce de Dieu. J’aimerais pouvoir continuer à servir ma communauté et faire plaisir à mes fans. » Cet appel avait suscité une vague d’émotion et de solidarité dans la diaspora, mais révélait en même temps la précarité des artistes haïtiens confrontés à la maladie.
Un héritage durable
Compositeur, arrangeur et chanteur, Garry Didier laisse derrière lui un héritage riche et varié. L’album Rache Pikan, ses interprétations poignantes, et son influence sur les jeunes musiciens témoignent d’un parcours exceptionnel. Ses chansons continuent de résonner lors des bals, sur les ondes et dans la mémoire de ceux qui ont grandi avec sa musique.
Au-delà de l’artiste, c’est toute une époque qu’il symbolisait. Celle d’un compas modernisé, porté par des voix puissantes, où les groupes rivalisaient de créativité et offraient à la jeunesse haïtienne un espoir, une identité, un souffle de fierté.
Une question en suspens
Avec sa disparition, Haïti perd plus qu’un chanteur : elle perd une partie de son patrimoine vivant. La trajectoire de Garry Didier illustre à la fois le génie et la fragilité des artistes haïtiens, capables d’éblouir des foules mais contraints, souvent, d’affronter seuls les revers de la vie.
La question s’impose désormais : que fait l’État pour honorer et accompagner ces créateurs qui, par leur art, portent si haut la mémoire et l’âme du pays ?















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