En juillet 2025, Haïti traverse l’une des périodes les plus sombres de son histoire contemporaine. Tandis que l’État se délite, que les gangs étendent leur emprise et que l’insécurité ravage le quotidien, des milliers d’Haïtiens ne rêvent que d’une chose : partir. Fuir le pays est devenu une obsession nationale, un réflexe de survie. Une dynamique tragique qui en dit long sur l’échec collectif d’une nation en chute libre.
Une obsession séculaire, ravivée en 2025
Depuis plusieurs générations, quitter Haïti fait partie de l’horizon de vie de nombreux citoyens. Mais en 2025, ce désir atteint un seuil critique. L’exil n’est plus un choix, mais une nécessité vitale. Le rêve d’un ailleurs, aux États-Unis, au Canada, au Chili ou au Brésil, a remplacé toute perspective de construction nationale.
Dans la société haïtienne actuelle, rechercher un sponsor, obtenir un visa, contacter un passeur ou s’inscrire à une loterie migratoire est devenu plus prioritaire que voter, étudier ou entreprendre. Le pays se vide de ses intelligences, de ses forces vives, de son avenir.
Gangstérisation et effondrement de l’État
L’insécurité généralisée est le principal moteur de cette nouvelle vague d’exode. En juillet 2025, plus de 60 % du territoire est sous contrôle de groupes armés, selon les Nations unies. L’attaque du 3 juillet dans le Plateau Central, au cours de laquelle plusieurs policiers ont été tués, illustre l’effondrement total de l’autorité publique.
Les écoles ferment, les hôpitaux fonctionnent sous menace, les routes nationales sont occupées ou impraticables. À Port-au-Prince comme dans l’Artibonite, c’est désormais la peur qui gouverne.
Le programme Biden : une fenêtre vite refermée
Entre 2023 et 2024, des milliers d’Haïtiens ont placé leurs espoirs dans le programme humanitaire de Joe Biden, qui permettait, sous conditions, une entrée légale aux États-Unis grâce à un système de parrainage. Bien que limité, ce couloir migratoire représentait une porte de sortie pour de nombreuses familles.
Mais en 2025, avec le changement d’administration à Washington, le programme est officiellement suspendu. Cette fermeture ravive le désespoir et redonne du pouvoir aux réseaux clandestins souvent dangereux, parfois mortels.
Une République bossale ?
Le juriste et écrivain Edgard Gousse décrit Haïti comme une “République bossale”, gouvernée par la violence brute, vidée de toute culture démocratique durable, coupée de la modernité civique. En juillet 2025, cette définition trouve une résonance brutale : l’État est impuissant, la société désintégrée, l’espoir national éteint.
Entre effondrement et choix historique
La fuite ne peut pas être un projet national. En juillet 2025, l’alternative est brutale : reconstruire ou disparaître. Reconstruire une autorité légitime, restaurer la sécurité, réinventer le lien civique. Sinon, Haïti deviendra un pays-fantôme, peuplé d’absents.
L’Histoire retiendra qu’un peuple entier a tenté de fuir, non par égoïsme, mais parce qu’il ne voyait plus d’autre issue. Mais cette fuite massive est aussi un cri d’alerte. Il est encore temps d’écouter ce cri, et de reconstruire, avant qu’il ne soit trop tard.
Brinia ELMINIS







































































































































































































































































































































