Port-au-Prince, 24 septembre 2025 — Coup de théâtre dans le paysage médiatique et judiciaire haïtien : l’ancien directeur général de la Télévision nationale d’Haïti (TNH), Gamall Jules Augustin, a été arrêté hier, mardi 23 septembre, par l’Unité de lutte contre la corruption (ULCC), à l’issue de son audition. Cette décision survient dans le cadre d’une enquête ouverte pour de graves accusations de mauvaise gestion au sein du média public.
Des accusations lourdes et persistantes
D’après les informations recueillies, M. Augustin est poursuivi pour plusieurs infractions présumées : abus de fonction, détournement de biens publics, prise illégale d’intérêts et faux en écriture. Ces accusations remontent à sa nomination en 2015 comme directeur général de la TNH, après avoir occupé dès 2012 le poste de directeur général adjoint.
Selon certains observateurs, la gestion de Gamall Augustin aurait laissé des séquelles durables sur le fonctionnement de la TNH, allant de recrutements fictifs à des dépenses jugées injustifiées, en passant par une dérive politique de l’institution censée représenter la voix publique.
Une audition qui s’est transformée en arrestation
Convoqué par l’ULCC, M. Augustin s’est présenté de son plein gré devant les enquêteurs. Mais au terme de plusieurs heures d’audition, il a été placé en état d’arrestation, puis déféré au parquet de Port-au-Prince où il a été mis en dépôt. Il doit comparaître ce mercredi devant le commissaire du gouvernement.
Son avocat, Me Mario Delcy, dénonce une décision « arbitraire et illégale ». « Mon client s’est présenté volontairement, il a coopéré pleinement. Or, l’ULCC a décidé de l’arrêter en invoquant à tort l’article 11 de sa loi organique. Cet article ne confère aucun pouvoir d’arrestation à l’institution », a-t-il martelé, rappelant un précédent où un citoyen, Alcantara, avait été libéré par le parquet après une arrestation similaire jugée abusive.
Des critiques anciennes qui refont surface
Les critiques contre Gamall Augustin ne sont pas nouvelles. En février 2025, une pétition initiée par le journaliste Rudy Thomas Sanon avait déjà réclamé une enquête approfondie sur sa gestion. Elle mettait en avant de graves irrégularités : utilisation de ressources de l’État pour des dépenses personnelles, frais d’hôtels considérés comme injustifiés, dysfonctionnements logistiques et techniques ayant paralysé certaines activités de la TNH.
De son côté, le syndicat des employés des médias d’État avait accusé l’ancien DG de mauvaise gestion financière et de malversations répétées. Certains membres dénonçaient aussi une perte de crédibilité et d’indépendance éditoriale de la RTNH sous son autorité, accusée d’être devenue un outil au service du pouvoir en place.
Cette arrestation soulève de vives interrogations sur le rôle et les pouvoirs réels de l’ULCC, mais elle relance également le débat sur la volonté politique de combattre la corruption en Haïti. Alors que plusieurs dossiers sensibles sont restés sans suite, le cas Gamall Augustin apparaît comme un signal fort envoyé à l’opinion publique.
Cependant, les critiques de la défense laissent planer un doute : s’agit-il d’une véritable avancée dans la lutte contre l’impunité, ou d’une opération sélective et arbitraire visant une figure déjà controversée ?
Dans un pays où les scandales de corruption se succèdent, l’évolution de ce dossier sera suivie de près. Le parquet de Port-au-Prince devra déterminer, dans les prochains jours, si les accusations portées contre l’ancien DG de la TNH sont suffisamment solides pour justifier des poursuites judiciaires formelles, ou s’il s’agit d’un excès de zèle de l’ULCC.
Carina Petit-homme
















































































































































































































