Ils ont bravé la mer dans l’espoir de fuir la misère, la violence et l’instabilité. Quarante Haïtiens, dont des femmes et des enfants, ont atteint la côte jamaïcaine ce dimanche 18 mai 2025 au matin. Mais leur rêve d’asile n’a duré que quelques heures. Moins de 24 heures après leur arrivée, ils étaient déjà sur le chemin du retour, rapatriés par les autorités jamaïcaines.
Un débarquement à l’aube sur la plage de Kensington
Hier dimanche, peu après 6 heures du matin, la police jamaïcaine a découvert un groupe d’environ 40 migrants haïtiens ayant accosté sur la plage de Kensington, dans la paroisse de Portland. Selon les forces de l’ordre, il s’agissait d’hommes, de femmes et d’enfants visiblement épuisés après une traversée périlleuse à bord d’une embarcation artisanale.
Aussitôt interceptés, les migrants ont été conduits dans un centre médical à Port Antonio pour un examen de santé. Bien que leur état physique ait été jugé stable, les médecins ont noté des signes évidents de malnutrition. Les migrants ont indiqué qu’ils n’avaient pas mangé depuis plusieurs jours, révélant l’extrême précarité de leur situation.
Fuir l’enfer : ce que disent les migrants
Les témoignages recueillis sur place sont poignants. Tous affirment fuir un pays en pleine dérive, marqué par une insécurité endémique, la montée en puissance des gangs armés, et une crise économique sans précédent. « Nous ne pouvions plus vivre là-bas. Chaque jour, c’était une lutte pour survivre », aurait confié l’un des hommes à une infirmière présente lors de l’évaluation médicale.
La présence d’enfants en bas âge parmi les migrants souligne l’ampleur du désespoir qui pousse des familles entières à tout risquer pour un ailleurs incertain.
Une réponse ferme des autorités jamaïcaines
Mais malgré la gravité de leur situation, la réponse des autorités jamaïcaines a été rapide et sans appel. Moins de 24 heures après leur arrivée, les migrants ont été embarqués à bord d’un navire de la Garde côtière américaine (JDF) au départ du quai de Boundbrook, à Port Antonio, direction Haïti.
Cette décision s’inscrit dans la politique migratoire stricte adoptée ces dernières années par plusieurs pays de la région, confrontés à une recrudescence des arrivées irrégulières en provenance d’Haïti.
Une crise régionale ignorée ?
L’épisode met en lumière la détresse croissante du peuple haïtien, pris en étau entre violences urbaines, pauvreté extrême et effondrement des structures étatiques. De plus en plus de citoyens n’ont d’autre choix que l’exil clandestin, au péril de leur vie.
Cependant, la réponse des pays voisins reste essentiellement sécuritaire, avec peu d’initiatives régionales concrètes pour gérer les causes profondes de cette migration forcée. Des voix s’élèvent déjà pour appeler à une approche plus humaine et solidaire, qui prenne en compte les droits fondamentaux des migrants.
Une traversée pour survivre, un avenir toujours incertain
Le sort réservé à ces 40 Haïtiens refoulés en pleine détresse humanitaire illustre une réalité alarmante : la région caribéenne fait face à une crise migratoire silencieuse, nourrie par l’effondrement d’Haïti. Chaque tentative de traversée est un cri d’alarme, un appel à l’aide que trop peu entendent. Tant que les causes profondes de l’insécurité, la pauvreté, le manque de perspectives ne seront pas traitées à la source, les bateaux de fortune continueront de prendre la mer. Face à ce drame humain, il devient impératif que les nations voisines fassent preuve non seulement de vigilance, mais aussi de compassion et de coopération pour bâtir des réponses durables.
Brinia ELMINIS